C'est le deuxième que je vois de près, comme ça, à Paris. Les autres années, en général, j'étais ailleurs ou je m'en foutais. Quand j'habitais en presque-banlieue sud, c'était amusant, je voyais le feu d'artifice du Trocadéro en reflet dans un immeuble en verre ; en revanche, j'avais une vue directe sur un autre, plus petit, au-delà du périph'.
En fond sonore, ce soir (enfin, fond sonore, allez raconter ça à mes oreilles, qui traînaient près des enceintes), des chansons sur Paris. J'étais content d'entendre s'enchaîner Il est cinq heures, Paris s'éveille et Le Poinçonneur des Lilas mais, à mon goût, il en manquait au moins deux :
L'accordéon désaccordé
Les accords d'l'accordéon désaccordé du beau Léon S'accordent au diapason du tourbillon des corps et des cœurs amoureux Et l'cordon langoureux de leur mélancolie Relie mon vague à l'âme au charme disparu des rues du vieux Paris Où sont tous les cam'lots, les princes de la gouaille Les champions du bagout, les grands bonimenteurs Les tarzans-la-houppette brillantinés de frais Qu'accrochaient leurs bijoux de pacotille au cou des midinettes en bigoudis Tous les p'tits ouistitis des joueurs de Barbarie qui tiraient sur les chaînes Jongleurs et funambules qui volaient dans les plumes des chanteuses à rengaines Fréhel et la Damia, charmeuses de cobras qui vous saignaient le cœur avec les trémolos du malheur dans la voix Les accords d'l'accordéon désaccordé du beau Léon me collent à fleur de peau des vagues de langueur, des nappes de frissons et l'cordon langoureux d'leur mélancolie marie mon vague à l'âme à celui de Paname qu'on aime et qu'on oublie Envolés les bougnats, café-bois-et-charbon les flambeurs de java soignant leurs peines de cœur au Martini-Picon les sifflets des poulbots qui fusaient de la place quand les filles à marlou valsaient la chaloupée l'été à la terrasse des caboulots Où sont passés les fous rires et tous les mots doux des amants de la Seine qu'étrennaient leur bonheur des quais de l'Isle Saint-Louis à Notre-Dame en fleurs Dans quel nid haut-perché du paradis des photographes se cachent les p'tits moineaux Du Paris de Doisneau chantés par la môme Piaf Les accords d'l'accordéon désaccordé du beau Léon me filent à fleur de peau des nappes de langueur, des vagues de frissons et dans c'vieux décor illuminé par les tubes au néon je noie mon mal d'amour dans les bras de Paname encerclé par les tours Mais qu'est-c' qu'y t'ont pas fait, mon Paris, ma canaille, tous ces démolisseurs Qu'ont un pavé dans l'cœur et des s'melles en béton Par où s'est envolé l'esprit des ritournelles s'évadant des ruelles Et du pavé des cours sous l'aile des hirondelles du faubourg T'as l'air d'un nouveau riche qu'a honte de son passé et qui jette la photo Déchirée de son âme par-dessus les périph' J't'abandonne aux touristes, aux branleurs de Tour Eiffel Et j'retourne en banlieue demander au bon dieu de faire la courte échelle Aux pianistes à bretelle souriant aux étoiles Que la boule de cristal renvoie du haut du ciel Sur les p'tits amoureux qui tournent autour des bals (Jacques Higelin) |
Paris la nuit (Ronde de nuit)
Au cœur de la ville endormie Reposent des millions d'gens soumis Personne d'autre pour hurler la nuit Que l'vieux clochard sous l'pont Marie Dans les rues y'a plus qu'des matons Tous les apaches sont en prison Tout est si calme qu'ca sent l'pourri Paris va crever d'ennui L'baron qui règne à la mairie Veut qu'tout l'monde aille au lit Sans bruit Les lits qui grincent sont interdits D'ronfler c'est toléré...merci!! Allons enfants de la patrie Contre nous de la tyrannie Dont nous abreuve ce bouffon Élu par de sinistres cons (*) Paris se meurt aujourd'hui De s'être donnée à un bandit Un salaud qui lui a pris Ses nuits blanches Paris la nuitc'est fini Paris va crever d'ennui Paris se meurt rendez lui Ses nuits blanches (La Mano Negra) |
Cela dit, je ne voudrais pas casser l'ambiance (il y en avait peu, d'ailleurs).
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